Examiner les défis en matière d’intégration des facteurs ESG : gouvernements, normes et solutions technologiques

26 mai 2022 | Cynthia Shaw-Pereira

Les défis complexes que doivent relever les investisseurs institutionnels qui cherchent à tenir compte de façon plus approfondie des facteurs ESG sont souvent liés aux données. Compte tenu de l’intérêt croissant des investisseurs, diverses mesures ESG, sources de données, de méthodes de pointage et normes de présentation se sont multipliées. Pourtant, le besoin de cohérence et de pertinence dans ces sources de données est un thème récurrent. 

Les investisseurs ont généralement besoin d’au moins un certain degré de personnalisation pour tenir compte des préférences et des priorités individuelles, des normes à l’appui du processus d’investissement ESG et de la possibilité de démontrer que les facteurs ESG sont représentés dans les placements durables. Les gestionnaires d’actifs, les compagnies d’assurance et les autres investisseurs institutionnels peuvent s’attendre à ce que les parties prenantes internes et externes exigent une plus grande transparence en matière d’investissement ESG dans leurs portefeuilles. Les propriétaires d’actifs sont confrontés à des demandes particulièrement complexes, les participants aux régimes, les organismes de promoteurs connexes et les groupes de parties prenantes étant de plus en plus conscients de la nécessité de mieux mesurer les facteurs ESG, d’en rendre compte et d’y donner suite pour atteindre les objectifs liés à ces facteurs. 

À certains égards, la quête de données plus robustes sur les facteurs ESG et de meilleurs résultats technologiques n’est qu’un exemple parmi d’autres des problèmes liés aux données auxquels font face les investisseurs institutionnels. La recherche de stratégies de placement et organisationnelles novatrices et perfectionnées se poursuit, dans un contexte où certains se tournent vers des technologies et des outils de pointe en matière de données pour simplifier leurs activités, saisir de nouvelles occasions sur le marché et obtenir un avantage concurrentiel. Les résultats cibles comprennent une plus grande agilité, une résilience accrue et une volonté de mieux préparer les activités technologiques en vue de l’avenir pour répondre aux besoins émergents de demain. Pour bon nombre de propriétaires d’actifs, la résolution des problèmes liés aux données et ceux liés aux facteurs ESG peut aller de pair. 

Éléments à considérer relativement aux données ESG

Pour être utilisables ou viables, les données ESG non structurées doivent être intégrées aux calculs analytiques et aux rapports internes et externes. Particulièrement pour les organisations qui cherchent à intégrer les facteurs ESG à une gamme de processus d’investissement et d’affaires, les données ESG ne peuvent être évaluées isolément et devront être reliées à d’autres contenus du processus de placement. Pour ajouter aux difficultés liées à la gestion des données, les fournisseurs de données ESG de tierce partie utilisent diverses méthodologies, ce qui entraîne des variations dans les pointages.

Les données proprement dites présentent des défis : Pourquoi utilise-t-on des fiches de pointage ou des taxonomies différentes pour les sociétés en portefeuille? Les clients doivent tenir compte des données, car finalement, elles serviront à effectuer un contrôle préalable pour déterminer si les données sont conformes à leurs objectifs en matière de durabilité. Ils utiliseront également les données pour établir un équilibre entre leurs tolérances financière et non financière : ils chercheront à déterminer s’il y a un coût de renonciation pour les priorités qu’ils veulent mettre en œuvre dans les portefeuilles de développement durable. Au bout du compte, chaque investisseur, gestionnaire et prestataire de services doit faire une évaluation pour comprendre sa place dans la chaîne de traitement des données. Quelles sont les obligations finales des parties prenantes, notamment en matière de communication de l’information, d’engagement organisationnel et d’activités de placement? 

Les parties prenantes devront poser des questions difficiles, par exemple : « Est-ce que nous nous concentrons principalement sur une exigence de déclaration ou essayons-nous de lier les données à une décision de placement? » Ou alors, « comment harmoniser les données ESG avec plus d’une équipe d’investissement durable ou de préparation d’information financière, et relier ces données dans l’ensemble de notre processus de placement? » En intégrant les facteurs ESG à une stratégie à long terme, les investisseurs éliminent la nécessité d’essayer de faire un arbitrage des données, c’est-à-dire de choisir certaines données et de commencer à les utiliser à titre de référence. Si la méthodologie de l’ensemble de données est connue, les organisations peuvent divulguer la façon dont elles prennent leurs décisions en fonction des données sur lesquelles leurs parties prenantes s’appuient. 

Au Canada et à l’échelle mondiale, nous continuons de constater que les investisseurs institutionnels cherchent non seulement à obtenir des données non structurées, mais aussi à relier entre elles plusieurs sources de données et à calculer leurs propres pointages, un peu comme s’ils créaient leur propre indice de référence pour évaluer l’incidence des facteurs ESG sur leurs décisions de placement. Alors que de plus en plus de sociétés se demandent comment intégrer les facteurs ESG à leurs processus quotidiens, elles doivent déterminer quelles sources d’information sur les facteurs ESG correspondent le mieux à leur méthode de placement et à leurs flux de travail.

Selon des recherches du Chartered Financial Analyst Institute et des Principes pour l’investissement responsable des Nations Unies, l’absence de normes relatives à la vérification des données ESG et la capacité de démontrer que les facteurs ESG façonnent les portefeuilles de placement font partie des principaux obstacles à une plus grande intégration des facteurs ESG dans les processus de placement. L’absence de normes peut également donner lieu à des allégations d’« écoblanchiment » ou de « blanchiment social », ce qui peut avoir une incidence sur la confiance et la crédibilité et, par conséquent, exposer les propriétaires d’actifs à des risques. Les investisseurs et leurs parties prenantes ont un intérêt clair et commun à créer des fondements permettant d’établir une confiance, qui comprennent des définitions et des mesures communes à partir desquelles procéder à des évaluations, des essais et des mesures et présenter des rapports. 

Solutions à l’horizon

Le gouvernement du Canada a fait mention del’absence de normes dans son budget fédéral de 2022, qui précise que le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) du Canada « consultera les institutions financières sous réglementation fédérale sur les lignes directrices en matière de divulgations sur le climat en 2022, et exigera que les institutions financières publient des divulgations sur le climat, conformément au cadre du GIFCC, au moyen d’une approche progressive à compter de 2024. » Selon le budget, le BSIF s’attend également à ce que les institutions financières recueillent et évaluent des renseignements sur les risques climatiques et les émissions de leurs clients. De plus, le gouvernement du Canada imposera des exigences en matière de divulgation des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), y compris les risques liés au climat, pour les régimes de retraite sous réglementation fédérale.

Heureusement, les progrès vers des normes communes se poursuivent sur plusieurs fronts. Par exemple, en janvier 2022, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont publié l’avis 81-334 – Information des fonds d’investissement au sujet des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance pour fournir des directives aux fonds de placement quant à la façon dont ces fonds devraient être nommés et celle dont les approches de placement devraient être inscrites dans les dépôts auprès des organismes réglementaires. De même, l’International Sustainability Standards Board (ISSB) – dont le siège social nord-américain est situé à Montréal – a récemment lancé une consultation sur ses exigences générales en matière de divulgation de renseignements liés à la durabilité et aux changements climatiques. L’ISSB indique qu’il sollicite des commentaires d’ici le 29 juillet 2022 et qu’il a l’intention de publier les nouvelles normes d’ici la fin de l’année, sous réserve de ces commentaires.

Les technologies seront un facteur essentiel pour obtenir la transparence accrue que les parties prenantes exigent. De nouveaux outils permettant aux gestionnaires d’actifs et aux équipes de financement des placements d’obtenir des renseignements détaillés sur les résultats et les directions d’entreprises seront des ressources importantes pour obtenir de l’information de pointe et répondre aux objectifs de conformité. Par exemple, notre application d’entreprise introduit le concept de « mesures participatives » pour répondre aux défis de durabilité et permet aux investisseurs de comparer leurs priorités et, par conséquent, de travailler à la réalisation de leurs stratégies. Comme pour tout groupe, le rendement global et relatif est important, et la capacité de mettre en parallèle des sociétés et de les comparer à des données de référence provenant de sociétés homologues est un élément clé pour répondre aux recommandations des conseils, des fiduciaires, des actionnaires et des autres parties prenantes en ce qui a trait aux progrès et aux occasions. 

En résumé, le contexte de placement lié aux facteurs ESG demeure complexe et évolue rapidement, mais les propriétaires d’actifs canadiens et leurs parties prenantes progressent tout aussi rapidement pour accroître leur niveau de complexité, leur compréhension et leurs capacités. 


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Auteur

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Cynthia Shaw-Pereira

Chef de la conception des solutions clients, Solutions de gestion du risque mondial
BNY Mellon Global Risk Solutions

Cynthia Shaw-Pereira est chef de la conception des solutions clients, Solutions de gestion du risque mondial de BNY Mellon. Madame Shaw-Pereira est responsable du service à la clientèle et des nouvelles initiatives commerciales en matière de produits et de services d’analyse du rendement et du risque pour les clients institutionnels de l’Amérique du Nord. Elle compte plus de 16 ans d’expérience dans le secteur des services financiers.