Les facteurs ESG englobent plus que l’environnement : des conseillers qui voient au-delà des émission

17 novembre 2022 | Jennifer So, Elgin Chau

Au cours de la dernière décennie, l’intérêt pour les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) a monté en flèche, les investissements responsables représentant plus de 62 % de tous les actifs gérés par des professionnels au Canada, selon l’Association pour l’investissement responsable (AIR) du Canada¹. Pourtant, de nombreux conseillers hésitent à parler des facteurs ESG à leurs clients. Un sondage d’opinion mené par l’AIR auprès des investisseurs a révélé que 77 % d’entre eux veulent que leurs conseillers leur parlent d’investissement responsable, mais que seulement 27 % ont déclaré avoir eu des entretiens à ce sujet avec leur planificateur financier². 

Si les facteurs ESG occupent de plus en plus de place dans les entretiens sur l’investissement, pourquoi les conseillers ne sont-ils pas plus nombreux à parler de durabilité avec leurs clients? Le problème, c’est que les facteurs ESG sont encore largement mal compris et que de nombreuses personnes du secteur des placements peinent à voir plus loin que la lettre « E » de l’acronyme, c’est-à-dire l’environnement. 

Les émissions ne sont que l’une des pièces du casse-tête.

Pour de nombreuses personnes, les facteurs ESG forment une notion thématique qui est souvent perçue du seul point de vue des changements climatiques. Des journalistes et des experts ont critiqué les facteurs ESG pour leurs mesures incohérentes ainsi que leurs objectifs imprécis et trop nombreux pour être significatifs. Certains sont allés jusqu’à affirmer que les facteurs ESG devraient être ramenés à une mesure simple : les émissions.

Bien qu’il soit compréhensible de s’en remettre implicitement à l’environnement et aux émissions – les émissions constituent le facteur ESG le plus facile à quantifier –, il s’agit là d’une vision extrêmement étroite. Si les émissions étaient le seul aspect à prendre en considération, les portefeuilles auraient une forte pondération de titres d’entreprises axées sur les technologies propres, les énergies de remplacement et d’autres préoccupations liées au climat. Cette vision suppose également que les investisseurs ne se soucient que de l’environnement, mais de nombreux Canadiens accordent aussi beaucoup d’importance aux questions sociales et de gouvernance, comme la parité au sein des conseils d’administration ou les pratiques équitables en matière de travail. 

Créer de la valeur grâce aux facteurs ESG

Depuis leur utilisation première comme instrument voué uniquement à l’harmonisation des placements et des valeurs des investisseurs, les facteurs ESG ont connu une longue évolution : ils englobent maintenant une réalité beaucoup plus large. Les facteurs ESG visent essentiellement à réduire les risques et à identifier les occasions émergentes, ce qui est l’une des principales raisons pour lesquelles les investisseurs institutionnels les ont intégrés dans leurs processus d’investissement. 

Le Boston Consulting Group (BCG) fait remarquer que les facteurs ESG attirent les investisseurs avertis parce qu’ils combinent des exigences de comptabilité financière avec des mesures de rendement non financières, ce qui peut non seulement aider la planète et contribuer au bien commun, mais aussi aider les investisseurs à atteindre leurs objectifs financiers. 

Les facteurs ESG nuisent-ils au rendement?

Certains investisseurs se demandent peut-être si les mesures liées aux facteurs ESG nuisent au rendement dans un contexte de volatilité accrue des marchés, mais les données ne justifient pas ces craintes. Selon l’AIR, l’indice MSCI Canada ESG Leaders a surpassé l’indice MSCI Canada sur le long terme. 

Nous croyons que c’est parce que les facteurs ESG – qui fournissent un cadre au moyen duquel toutes les entreprises peuvent être considérées – améliorent le processus de placement en fournissant un filtre supplémentaire permettant d’éliminer les mauvais acteurs, d’évaluer les risques et de repérer les occasions. L’intégration des facteurs ESG n’a pas besoin d’être considérée comme un style de placement en soi. 

Les investisseurs reconnaissent de plus en plus que les gouvernements et les organismes de réglementation continueront d’imposer des règles plus strictes, en particulier lorsqu’il est question d’harmoniser la communication de l’information sur le climat. À mesure que ces règles prendront de l’importance, les entreprises qui n’auront pas pris au sérieux des enjeux comme les changements climatiques risquent de s’exposer à des pénalités sévères et à de possibles poursuites qui pourraient gruger leurs résultats. 

Un message pour les entreprises : les facteurs ESG sont en plein essor au Canada

Les entreprises canadiennes prennent la situation au sérieux. Selon un rapport publié en 2021 par Millani, une société montréalaise d’experts-conseils en matière de facteurs ESG, plus de 70 % des entreprises de l’indice composé S&P/TSX produisent désormais des rapports sur les facteurs ESG, par comparaison à 36 % en 2016 – y compris certaines entreprises du secteur de l’énergie. 

Cet intérêt accru ne devrait pas surprendre. Selon un sondage d’Ipsos mené entre le 27 et le 30 août 2021, les deux tiers des Canadiens accordent de l’importance aux facteurs ESG lorsqu’ils prennent des décisions de placement³. Le désir d’investir de façon responsable est encore plus marqué chez les investisseurs de la relève, 71 % des personnes âgées de 18 à 34 ans prenant en compte les facteurs ESG. 

Si les entreprises veulent réussir, tant du point de vue des revenus que de celui des cours boursiers, elles devront probablement prouver à leurs clients qu’elles se soucient des enjeux ESG. 

Mieux s’éduquer sur le sujet et en parler plus : une nécessité

Si nous voulons que ces idées fausses changent, alors il est nécessaire de mieux s’éduquer. Une étude de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario a révélé ceci : un tiers des investisseurs affirment que l’accès à l’information sur les facteurs ESG les aide à prendre de meilleures décisions en matière de placement. Comme de nombreux investisseurs ne connaissent toujours pas les facteurs ESG, les conseillers qui peuvent les renseigner à ce sujet tiennent une occasion d’augmenter leur valeur auprès de leurs clients.

Un bon point de départ consiste peut-être à souligner que les facteurs ESG ratissent plus large que les changements climatiques. 

L’évolution des valeurs en ce qui a trait aux questions environnementales et sociales ouvrira de nouvelles industries (p. ex. : les véhicules électriques) et de nouveaux marchés (p. ex. : les crédits de carbone) et créera des occasions pour que soient mis de l’avant des thèmes trop longtemps tenus à l’écart (p. ex. : l’accroissement du nombre de femmes qui occupent des postes de leadership).

Pour les conseillers qui veulent continuer à offrir de la valeur à leurs clients, il est important de penser plus loin que le « E » de l’acronyme ESG. Comme le souligne le BGC, les innovations et les investissements des entreprises qui cherchent à s’améliorer dans les trois catégories des facteurs ESG pourraient injecter des sommes de l’ordre du mille milliards de dollars dans l’économie mondiale d’ici 2050. En adoptant un cadre axé sur les facteurs ESG, les investisseurs pourront plus facilement repérer ces entreprises et prendre part aux rendements potentiels des placements. 

Il est temps que le secteur des placements examine les répercussions et le potentiel plus vastes liés aux facteurs ESG afin de repérer les occasions de gestion des risques. Comme les investisseurs n’ont pas tous les mêmes valeurs, il incombe au conseiller de parler des facteurs ESG à ses clients et de déterminer où ils se situent sur le plan des valeurs en ce qui a trait aux facteurs ESG. En tant que conseiller, vous n’avez pas à prendre parti – vous devez simplement mettre l’accent sur la situation dans son ensemble.

[1] En date du 21 décembre 2019
[2] En date de septembre 2021
[3] En date de novembre 2021


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Auteur

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Jennifer So

Directrice de portefeuille, Actions, Stratégie fondamentale
BMO Global Asset Management

Mme So s’est jointe à BMO Gestion d’actifs inc. en septembre 2015. Directrice de portefeuille, elle est spécialiste de l’investissement responsable et met l’accent sur la diversité, l’inclusion et les occasions durables. Elle a travaillé pendant une dizaine d’années dans une banque canadienne et y a acquis de l’expérience dans les domaines des services d’investissement, de la recherche et des titres institutionnels. De plus, Mme So compte sept années d’expérience à titre de comptable agréée au sein de l’un des quatre grands cabinets comptables et a enseigné la finance au premier cycle dans une université canadienne. Elle détient un baccalauréat en commerce de l’Université de Toronto et porte les titres d’analyste financière agréée (CFA), de comptable agréée (CA) et de comptable professionnelle agréée (CPA).

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Elgin Chau

Directeur, Intégration des ESG, Investissement responsable
BMO GAM

Elgin soutient l’intégration des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) auprès des équipes de placement et des catégories d’actifs de BMO Gestion mondiale d’actifs. Elgin s’est joint à BMO Gestion mondiale d’actifs après avoir travaillé chez Act Analytics, une société d’analyse des facteurs ESG qu’il a cofondée et qui a récemment été acquise par un important fournisseur de données financières. Auparavant, il a travaillé chez Connor, Clark & Lunn Investment Management à titre de spécialiste des produits d’actions quantitatives, ainsi qu’à Guardian Capital comme analyste quantitatif, où il était responsable de la conception et de la mise en œuvre de stratégies de placements systématiques. Elgin est titulaire d’un baccalauréat ès sciences en informatique de l’Université de Toronto.