Les questions relatives aux droits des autochtones et à la réconciliation sont importantes : Comment les investisseurs peuvent-ils soutenir la diligence raisonnable ?

Les investisseurs de tout le pays reconnaissent l’importance de veiller à ce que la transition du Canada vers une économie à zéro émission nette répartisse équitablement les avantages et les défis entre les Canadiens — ce qu’on appelle souvent une transition juste. Au centre de la discussion se trouvent les peuples autochtones du Canada, qui ont toujours été exclus des bénéfices des succès économiques du Canada, tout en supportant le poids de ses retombées environnementales et sociales. Pour les investisseurs d’aujourd’hui, cela se traduit par des risques et des opportunités liés aux droits des autochtones et à la réconciliation dans le cadre de leurs investissements. 

Le secteur minier canadien étant appelé à se développer pour répondre à la demande en minéraux et en métaux destinés à rendre les infrastructures mondiales plus écologiques, les investisseurs doivent évaluer la manière dont les entreprises prennent en compte les questions de réconciliation et de droits des autochtones à court terme. Par exemple, pas plus tard qu’en octobre 2022, une société australienne a renoncé à deux projets miniers au Québec en raison de l’opposition de la Première nation Kebaowek. Ces éléments sont significatifs pour les investisseurs de diverses manières, ce qui rend indispensable l’amélioration des informations fournies par les émetteurs.

Pourquoi les divulgations des entreprises sur les questions autochtones sont importantes

Les arguments moraux en faveur d’un traitement approprié des communautés autochtones et de leurs terres sont clairs et évidents pour les investisseurs de tous types ; la Commission de vérité et réconciliation fournit un compte rendu historique des atrocités passées et présentes commises à l’encontre des peuples autochtones. L’analyse de cas est également importante pour les investisseurs. Elle comprend plusieurs considérations clés :

  1. Retards – Les retards dans les grands projets miniers dus à l’absence de prise en compte de l’impact du développement sur les terres autochtones et à proximité de celles-ci peuvent entraîner des pertes financières importantes. L’un des exemples les plus célèbres est sans doute celui du Dakota Access Pipeline (DAPL), dont le coût était initialement estimé à 3,8 milliards de dollars américains et qui a finalement coûté à Energy Transfer Partners (ETP) plus de 7,5 milliards de dollars. Dans ses propres documents judiciaires de l’époque, ETP a estimé qu’un retard d’un an sur le projet coûterait 1,4 milliard de dollars, qu’un retard temporaire coûterait 430 millions de dollars, les coûts de démobilisation s’élevant à eux seuls à 200 millions de dollars. 
  2. Perception du public et partenariats – Pendant l’affaire DAPL, plus de 5 milliards de dollars ont été désinvestis des banques qui ont financé le pipeline. Des titulaires de comptes individuels, des tribus autochtones et des villes comme Seattle se sont retirés de Wells Fargo et d’autres banques en raison de leur manque de réactivité face aux revendications des autochtones. 
  3. Prix de l’action – Lorsqu’il est apparu clairement, par le biais d’une action en justice de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, que Minera San Rafael, une filiale de Pan American Silver opérant au Guatemala, ne faisait pas état de l’opposition des communautés indigènes Xinca locales, le cours des actions a chuté de 27 à 5 dollars.
  4. Poursuites – Cette affaire a donné lieu à une série de poursuites judiciaires, ainsi qu’à la suspension des activités minières par le tribunal guatémaltèque. Les litiges juridiques se poursuivent au-delà des frontières du Canada, avec une attention constante portée aux filiales internationales ayant leur siège au Canada. 

De nombreux investisseurs peuvent encore avoir besoin de conseils sur la manière de s’assurer que ces questions sont prises en compte dans les informations fournies par une entreprise et dans leurs décisions d’investissement.

Approches visant à améliorer les divulgations relatives aux droits et à la réconciliation des autochtones

Pour de nombreux investisseurs, les plans d’action de réconciliation des entreprises constituent une étape clé à prendre en considération. Ces plans exposent clairement et publiquement les objectifs et la feuille de route d’une organisation sur la manière dont elle s’engagera et collaborera avec les communautés indigènes, souvent dans le contexte de cadres clés, notamment :

Les plans d’action de réconciliation sont un outil important que les investisseurs peuvent demander et examiner pour voir comment une entreprise progresse dans son travail d’amélioration de la communication sur les questions autochtones et au-delà. Les investisseurs doivent rechercher des objectifs quantifiables, des méthodologies clairement divulguées et des mécanismes qui fournissent des mises à jour régulières afin que les parties prenantes puissent évaluer les progrès. Les investisseurs peuvent poser des questions de suivi même si aucun plan d’action de réconciliation n’est disponible, y compris comment et où ces cadres et d’autres sont abordés. 

Autres questions que les investisseurs peuvent poser à leurs gestionnaires d’actifs et à leurs émetteurs :

  • Qu’est-ce qui a été soumis aux organismes de réglementation/gouvernement ou à d’autres tiers en ce qui concerne les autorisations et les divulgations autochtones? Où les investisseurs et le public peuvent-ils accéder à ces informations?
  • Quels problèmes ont été signalés lors de l’exercice de la diligence raisonnable en ce qui concerne les droits, titres et terres autochtones? Comment l’entreprise les aborde-t-elle?
  • Comment les filiales et les entrepreneurs/sous-traitants sont-ils comptabilisés et impliqués dans ce travail? Quels sont les processus et où sont les rapports pour s’assurer qu’ils sont également conformes à ce qui précède?

Bien que la législation qui reflète une grande partie des questions ci-dessus puisse arriver bientôt au Canada, les investisseurs ne doivent pas attendre. L’argument moral et commercial est clair pour les investisseurs. Poser ces questions est une première étape pour assurer une diligence raisonnable dans les divulgations sur les droits des autochtones et la réconciliation, et pour s’assurer que les considérations matérielles pour les communautés et les portefeuilles sont gérées avec succès.

Nous remercions Joseph Bastien et la Reconciliation and Responsible Investment Initiative (RRII) pour leurs contributions à la recherche impliquée dans cet article.

Comment les investisseurs peuvent renforcer les questions relatives aux droits de l’homme dans les entreprises de technologies de l’information et de la communication

Les droits de l’homme sont fondamentaux, le socle de la société. Pourtant, notre société est constamment confrontée aux risques qui pèsent sur ces droits, et les questions relatives aux droits numériques occupent une place importante dans ce débat. 

Dans ce dialogue, Michela Gregory de Placements NEI et Anita Dorett de l’Investor Alliance for Human Rights discutent des avantages de la collaboration des investisseurs sur les questions relatives aux droits de l’homme, notamment dans le secteur des technologies de l’information et des communications (TIC). 

L’Investor Alliance for Human Rights est une plateforme d’action collective pour un investissement responsable fondé sur le respect des droits fondamentaux des personnes. Les investisseurs ont la responsabilité de respecter les droits de l’homme, conformément aux Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. L’Investor Alliance a publié la boîte à outils, l’Investor Toolkit on Human Rights, destinée spécifiquement aux propriétaires et gestionnaires d’actifs, afin qu’ils abordent les risques en matière de droits de l’homme posés par leurs investissements. Cette boîte à outils fournit les éléments de base permettant aux investisseurs de créer leur approche de la gestion des risques liés aux droits de l’homme au sein de leur organisation et dans le cadre de leurs activités d’investissement.

Anita : Collaborer sur les questions relatives aux droits de l’homme présente de nombreux avantages. En partageant leurs connaissances et leurs expériences, les investisseurs peuvent améliorer leur compréhension des risques liés aux droits de l’homme dans les entreprises de leur portefeuille, et de l’importance de ces risques pour la valeur à long terme du portefeuille. La collaboration augmente l’effet de levier des investisseurs pour pousser les entreprises à entreprendre une diligence raisonnable en matière de droits de l’homme qui permettra des pratiques commerciales respectueuses de ces droits. Elle permet aux investisseurs de s’engager avec un plus large éventail de sociétés de portefeuille en utilisant des ressources partagées.

L’Investor Alliance offre également une plateforme permettant aux investisseurs de dialoguer avec les organisations de la société civile qui défendent les titulaires de droits ayant subi un impact négatif. Cette collaboration donne un aperçu des risques liés aux droits de l’homme et des préjudices qui en découlent, ce qui contribuera à éclairer les engagements des investisseurs.  

Michela : Au fil de nos engagements, nous avons constaté que l’attitude des entreprises à l’égard des droits de l’homme peut varier considérablement. Pour que les investisseurs s’acquittent de leur responsabilité en matière de respect des droits de l’homme, ils doivent comprendre comment les sociétés de leur portefeuille réagissent aux impacts potentiels et réels sur les droits de l’homme, et ceux-ci (ainsi que les autres parties prenantes) demandent des rapports rigoureux. 

Parfois, les entreprises qui ont une longueur d’avance sur leurs pairs en ce qui concerne les impacts sur les droits de l’homme sont plus enclines à limiter leurs divulgations publiques. D’autres peuvent avoir des engagements solides, mais leurs actions sont difficiles à évaluer en raison de leur divulgation limitée. La collaboration dans des groupes de discussion multipartites peut permettre aux investisseurs d’amplifier les demandes claires et informées des bénéficiaires des investissements. Ceci est particulièrement important, car nous sommes toujours en pleine normalisation des attentes en matière de divulgation, même si des ressources telles que les Principes directeurs des Nations unies pour l’établissement de rapports fournissent des orientations.

Anita : La divulgation est un point critique, en particulier lorsque nous parlons de lacunes dans la divulgation. L’influence croissante du secteur des TIC a reconfiguré tous les aspects de nos vies, en particulier après la pandémie de COVID-19.

Par exemple, le modèle économique de Meta repose presque entièrement sur les recettes publicitaires, qui représenteront près de 98 % de ses recettes mondiales en 2020. Meta s’appuie sur l’intelligence artificielle (IA) qui utilise des systèmes algorithmiques pour diffuser des publicités ciblées. Cependant, peu d’informations sont rendues publiques sur la manière dont ces systèmes fonctionnent pour déterminer les publicités que voit un utilisateur ni sur les risques potentiels ou réels qui en résultent pour les droits de l’homme.

Au cours de la dernière saison des assemblées, les investisseurs ont déposé une proposition auprès de Meta lui demandant de réaliser une Évaluation de l’impact sur les droits de l’homme (EIDH) de ses politiques et pratiques en matière de publicité ciblée. La proposition a obtenu 23,8 % des voix, ce qui représente plus de 77 % du vote « indépendant », une fois que les actions contrôlées par le chef de la direction ont été écartées. Cela devrait envoyer un message clair à l’entreprise que les investisseurs exigent davantage en matière de droits de l’homme. Des propositions similaires demandant des EIDH sur divers aspects des opérations ou des relations commerciales ont été déposées chez Alphabet et Amazon, également avec un fort soutien des actionnaires indépendants.

Les investisseurs reconnaissent que le respect des personnes et de la planète est au cœur de la création de valeur à long terme. Pour évaluer le risque lié aux droits de l’homme dans leur portefeuille, les investisseurs doivent demander aux sociétés de leur portefeuille de faire de même. Les entreprises devraient adopter une approche itérative pour s’assurer que leurs décisions concernant tous les aspects des opérations et des relations dans la chaîne de valeur tiennent compte des impacts négatifs sur les parties prenantes et les titulaires de droits et veillent à les prévenir.

Mais l’adoption de la diligence raisonnable en matière de droits de l’homme a été lente et décevante. Le Corporate Human Rights Benchmark, qui évalue les performances en matière de droits de l’homme des 230 plus grandes entreprises cotées en bourse dans des secteurs à haut risque, a révélé qu’à partir de 2020, près de la moitié des entreprises ont obtenu un score de zéro pour les cinq indicateurs de diligence raisonnable en matière de droits de l’homme. Plus de 200 investisseurs mondiaux représentant plus de 5 800 billions de dollars américains d’actifs sous gestion, réunis par notre organisation, ont envoyé une déclaration à 106 entreprises demandant une action urgente pour mettre en œuvre la diligence raisonnable en matière de droits de l’homme. Certains investisseurs ont indiqué qu’en l’absence d’amélioration, ils seraient prêts à invoquer le processus de vote par procuration pour motiver les retardataires.

Michela : Même si nous constatons une plus grande divulgation des engagements en matière de droits de l’homme, il y a encore beaucoup de choses que les entreprises ne divulguent pas sur la manière dont elles mettent en œuvre leurs politiques. La divulgation peut aider les investisseurs à vérifier le type de mesures prises par les entreprises en matière de droits de l’homme. Cela devient une exigence, car des réglementations sont adoptées dans des juridictions telles que l’Union européenne. 

La collaboration avec des investisseurs partageant les mêmes idées nous positionne, ainsi que les entreprises, pour des engagements plus efficaces mutuellement. Bien entendu, l’une des principales demandes porte sur une plus grande divulgation de la manière dont les entreprises mettent en œuvre leurs engagements et leurs politiques en matière de droits de l’homme. Grâce à la collaboration, nous pouvons accroître notre capacité à avoir un impact significatif.


Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.

Les facteurs ESG englobent plus que l’environnement : des conseillers qui voient au-delà des émission

Au cours de la dernière décennie, l’intérêt pour les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) a monté en flèche, les investissements responsables représentant plus de 62 % de tous les actifs gérés par des professionnels au Canada, selon l’Association pour l’investissement responsable (AIR) du Canada¹. Pourtant, de nombreux conseillers hésitent à parler des facteurs ESG à leurs clients. Un sondage d’opinion mené par l’AIR auprès des investisseurs a révélé que 77 % d’entre eux veulent que leurs conseillers leur parlent d’investissement responsable, mais que seulement 27 % ont déclaré avoir eu des entretiens à ce sujet avec leur planificateur financier². 

Si les facteurs ESG occupent de plus en plus de place dans les entretiens sur l’investissement, pourquoi les conseillers ne sont-ils pas plus nombreux à parler de durabilité avec leurs clients? Le problème, c’est que les facteurs ESG sont encore largement mal compris et que de nombreuses personnes du secteur des placements peinent à voir plus loin que la lettre « E » de l’acronyme, c’est-à-dire l’environnement. 

Les émissions ne sont que l’une des pièces du casse-tête.

Pour de nombreuses personnes, les facteurs ESG forment une notion thématique qui est souvent perçue du seul point de vue des changements climatiques. Des journalistes et des experts ont critiqué les facteurs ESG pour leurs mesures incohérentes ainsi que leurs objectifs imprécis et trop nombreux pour être significatifs. Certains sont allés jusqu’à affirmer que les facteurs ESG devraient être ramenés à une mesure simple : les émissions.

Bien qu’il soit compréhensible de s’en remettre implicitement à l’environnement et aux émissions – les émissions constituent le facteur ESG le plus facile à quantifier –, il s’agit là d’une vision extrêmement étroite. Si les émissions étaient le seul aspect à prendre en considération, les portefeuilles auraient une forte pondération de titres d’entreprises axées sur les technologies propres, les énergies de remplacement et d’autres préoccupations liées au climat. Cette vision suppose également que les investisseurs ne se soucient que de l’environnement, mais de nombreux Canadiens accordent aussi beaucoup d’importance aux questions sociales et de gouvernance, comme la parité au sein des conseils d’administration ou les pratiques équitables en matière de travail. 

Créer de la valeur grâce aux facteurs ESG

Depuis leur utilisation première comme instrument voué uniquement à l’harmonisation des placements et des valeurs des investisseurs, les facteurs ESG ont connu une longue évolution : ils englobent maintenant une réalité beaucoup plus large. Les facteurs ESG visent essentiellement à réduire les risques et à identifier les occasions émergentes, ce qui est l’une des principales raisons pour lesquelles les investisseurs institutionnels les ont intégrés dans leurs processus d’investissement. 

Le Boston Consulting Group (BCG) fait remarquer que les facteurs ESG attirent les investisseurs avertis parce qu’ils combinent des exigences de comptabilité financière avec des mesures de rendement non financières, ce qui peut non seulement aider la planète et contribuer au bien commun, mais aussi aider les investisseurs à atteindre leurs objectifs financiers. 

Les facteurs ESG nuisent-ils au rendement?

Certains investisseurs se demandent peut-être si les mesures liées aux facteurs ESG nuisent au rendement dans un contexte de volatilité accrue des marchés, mais les données ne justifient pas ces craintes. Selon l’AIR, l’indice MSCI Canada ESG Leaders a surpassé l’indice MSCI Canada sur le long terme. 

Nous croyons que c’est parce que les facteurs ESG – qui fournissent un cadre au moyen duquel toutes les entreprises peuvent être considérées – améliorent le processus de placement en fournissant un filtre supplémentaire permettant d’éliminer les mauvais acteurs, d’évaluer les risques et de repérer les occasions. L’intégration des facteurs ESG n’a pas besoin d’être considérée comme un style de placement en soi. 

Les investisseurs reconnaissent de plus en plus que les gouvernements et les organismes de réglementation continueront d’imposer des règles plus strictes, en particulier lorsqu’il est question d’harmoniser la communication de l’information sur le climat. À mesure que ces règles prendront de l’importance, les entreprises qui n’auront pas pris au sérieux des enjeux comme les changements climatiques risquent de s’exposer à des pénalités sévères et à de possibles poursuites qui pourraient gruger leurs résultats. 

Un message pour les entreprises : les facteurs ESG sont en plein essor au Canada

Les entreprises canadiennes prennent la situation au sérieux. Selon un rapport publié en 2021 par Millani, une société montréalaise d’experts-conseils en matière de facteurs ESG, plus de 70 % des entreprises de l’indice composé S&P/TSX produisent désormais des rapports sur les facteurs ESG, par comparaison à 36 % en 2016 – y compris certaines entreprises du secteur de l’énergie. 

Cet intérêt accru ne devrait pas surprendre. Selon un sondage d’Ipsos mené entre le 27 et le 30 août 2021, les deux tiers des Canadiens accordent de l’importance aux facteurs ESG lorsqu’ils prennent des décisions de placement³. Le désir d’investir de façon responsable est encore plus marqué chez les investisseurs de la relève, 71 % des personnes âgées de 18 à 34 ans prenant en compte les facteurs ESG. 

Si les entreprises veulent réussir, tant du point de vue des revenus que de celui des cours boursiers, elles devront probablement prouver à leurs clients qu’elles se soucient des enjeux ESG. 

Mieux s’éduquer sur le sujet et en parler plus : une nécessité

Si nous voulons que ces idées fausses changent, alors il est nécessaire de mieux s’éduquer. Une étude de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario a révélé ceci : un tiers des investisseurs affirment que l’accès à l’information sur les facteurs ESG les aide à prendre de meilleures décisions en matière de placement. Comme de nombreux investisseurs ne connaissent toujours pas les facteurs ESG, les conseillers qui peuvent les renseigner à ce sujet tiennent une occasion d’augmenter leur valeur auprès de leurs clients.

Un bon point de départ consiste peut-être à souligner que les facteurs ESG ratissent plus large que les changements climatiques. 

L’évolution des valeurs en ce qui a trait aux questions environnementales et sociales ouvrira de nouvelles industries (p. ex. : les véhicules électriques) et de nouveaux marchés (p. ex. : les crédits de carbone) et créera des occasions pour que soient mis de l’avant des thèmes trop longtemps tenus à l’écart (p. ex. : l’accroissement du nombre de femmes qui occupent des postes de leadership).

Pour les conseillers qui veulent continuer à offrir de la valeur à leurs clients, il est important de penser plus loin que le « E » de l’acronyme ESG. Comme le souligne le BGC, les innovations et les investissements des entreprises qui cherchent à s’améliorer dans les trois catégories des facteurs ESG pourraient injecter des sommes de l’ordre du mille milliards de dollars dans l’économie mondiale d’ici 2050. En adoptant un cadre axé sur les facteurs ESG, les investisseurs pourront plus facilement repérer ces entreprises et prendre part aux rendements potentiels des placements. 

Il est temps que le secteur des placements examine les répercussions et le potentiel plus vastes liés aux facteurs ESG afin de repérer les occasions de gestion des risques. Comme les investisseurs n’ont pas tous les mêmes valeurs, il incombe au conseiller de parler des facteurs ESG à ses clients et de déterminer où ils se situent sur le plan des valeurs en ce qui a trait aux facteurs ESG. En tant que conseiller, vous n’avez pas à prendre parti – vous devez simplement mettre l’accent sur la situation dans son ensemble.

[1] En date du 21 décembre 2019
[2] En date de septembre 2021
[3] En date de novembre 2021


Clause de non-responsabilité du contributeur
Les opinions exprimées par l’auteur représentent son évaluation au moment de la publication. Ces opinions peuvent changer en tout temps et sans préavis. Les renseignements fournis dans le présent document ne constituent pas une sollicitation ni une offre relative à l’achat ou à la vente de titres, et ils ne doivent pas non plus être considérés comme des conseils de placement. Cette communication est fournie à titre informatif seulement.

BMO Gestion mondiale d’actifs est une marque de commerce sous laquelle BMO Gestion d’actifs inc. et BMO Investissements Inc. exercent leurs activités.

MC / MD Marque de commerce / marque de commerce déposée de la Banque de Montréal, utilisée sous licence.

Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.

Le rôle de l’engagement actionnarial dans la rémunération des dirigeants

La rémunération des dirigeants est l’un des aspects les plus visibles du programme de gouvernance d’entreprise d’une société cotée en bourse, et celle-ci se doit d’être compétitive pour attirer et retenir les dirigeants. Du point de vue des actionnaires, la meilleure pratique consiste à s’aligner sur les performances financières et sur la manière dont un dirigeant atteint les objectifs stratégiques de l’entreprise.

Les mesures de performance sont généralement axées sur les objectifs financiers ou opérationnels et sur le rendement pour les actionnaires. Cependant, comme les entreprises continuent d’accorder plus d’importance aux stratégies environnementales, sociales et de gouvernance (ESG), les indicateurs liés aux performances ou aux objectifs ESG deviennent de surcroît un élément additionnel dans la rémunération des dirigeants. Cela crée un élément supplémentaire à évaluer pour les actionnaires lorsqu’ils doivent décider de leur vote sur les propositions de vote consultatif sur la rémunération des dirigeants. 

Responsabilité ESG

L’inclusion de critères de performance ESG dans la planification de la rémunération des cadres est relativement récente, bien qu’elle soit plus courante dans les grandes entreprises que dans les petites. En 2020, 57 % des entreprises du S&P 500 incluaient des mesures ESG dans leurs plans de rémunération des dirigeants, contre 10 % des entreprises du Russell 3000 (à l’exclusion des entreprises du S&P 500); en date de la saison de procuration de 2022, 75 % des sociétés du TSX60 ont intégré des mesures ESG dans la rémunération des dirigeants ou ont fait part de leur intention de le faire au cours de l’année. Ces résultats ne sont peut-être pas surprenants puisque les grandes entreprises ont tendance à être plus avancées dans leur démarche ESG.  

Applications variées

De nombreuses entreprises intègrent des mesures de performance ESG dans les régimes incitatifs à court terme (STIP). Jusqu’à présent en 2022, 68 % des entreprises du TSX60 qui intègrent des critères ESG dans les incitations le font uniquement dans le STIP, 27 % intègrent des critères ESG à la fois dans le STIP et dans le régime incitatif à long terme (LTIP), et 2 % les intègrent uniquement dans le LTIP. Bon nombre de ces entreprises utilisent une méthode de tableau de bord, où les différents paramètres ESG sont regroupés avec d’autres objectifs de l’entreprise, généralement sans pondération spécifique. D’autres emploient des objectifs ESG pondérés autonomes, et certains utilisent la performance ESG comme un modificateur pour augmenter ou diminuer l’ensemble du paiement.      

Les mesures ESG peuvent être des indicateurs prospectifs, tels que les objectifs de réduction des émissions, ou des indicateurs retardés, tels que les performances en matière de santé et de sécurité ou les scores de satisfaction des clients. Il existe de nombreuses façons dont les entreprises peuvent structurer les objectifs de rémunération des dirigeants. Les investisseurs s’attendraient à ce que les objectifs d’une entreprise soient pertinents et significatifs pour l’entreprise. Bien que l’année 2022 ait vu une augmentation du nombre de paramètres environnementaux et climatiques ajoutés dans tous les secteurs parmi les grandes entreprises canadiennes, le capital humain et les questions sociales constituaient la majorité des objectifs ESG des entreprises.

Considérations pour les investisseurs

Compte tenu des nombreuses variations et des précédents historiques limités, voici quelques considérations à l’intention des investisseurs lorsqu’ils s’engagent auprès d’un conseil d’administration au sujet de la rémunération des dirigeants :

  1. Le Conseil d’administration doit être en mesure d’expliquer les raisons du choix de certains critères et objectifs ESG, et la manière dont ils s’alignent sur l’activité et l’importance financières de l’entreprise.
  2. Le Conseil d’administration et le comité de rémunération doivent être en mesure d’expliquer pourquoi les mesures ESG sélectionnées sont intégrées dans les éléments de rémunération spécifiques, tels que le STIP ou le LTIP. Les mesures opérationnelles rétrospectives sont généralement considérées comme des mesures à court terme et conviennent probablement mieux au STIP, tandis que les objectifs prospectifs reflètent la vision à long terme et conviennent mieux au LTIP. Un trop grand nombre de critères ESG pourrait indiquer un manque de concentration et se faire au détriment d’autres objectifs commerciaux importants, tandis qu’un accent mis uniquement sur les objectifs ESG basés sur les opérations pourrait être insuffisant pour encourager les progrès nécessaires à la réalisation des objectifs ESG.
  3. Le Conseil devrait être en mesure d’articuler son processus de surveillance de la gouvernance pour surveiller les critères ESG sélectionnés. 

Les mesures et objectifs ESG choisis doivent être étayés par des données accessibles et transparentes pour les parties prenantes. De nombreuses entreprises incluent des objectifs liés au capital humain, tels que la diversité et l’inclusion (D&I), l’engagement des employés et la culture. Cependant, les informations sur la D&I sont encore un domaine à améliorer pour de nombreuses entreprises, et la culture d’entreprise reste intangible. Le fait de disposer de mesures claires aide les actionnaires à comprendre comment les performances ESG sont alignées sur la rémunération des dirigeants.  

La prise en compte des critères ESG dans la rémunération des dirigeants est un domaine relativement nouveau, nuancé et contextuel pour chaque entreprise. Les attentes des investisseurs et les cadres d’évaluation devraient continuer à renforcer les principes de meilleures pratiques tels que la rémunération au rendement et la transparence.


Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.

Les chemins de fer sont-ils la solution la plus respectueuse de l’environnement en matière de transport de marchandises?

Selon l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA), les principales sources d’émissions de gaz à effet de serre aux États-Unis proviennent de la combustion de combustibles fossiles pour l’électricité, le chauffage et le transport. Le secteur des transports génère la plus grande part des gaz à effet de serre (GES), soit 27 % des émissions totales de l’économie, suivi par le secteur de l’énergie électrique (25 %), l’industrie (24 %), le secteur commercial et résidentiel (13 %) et l’agriculture (11 %). 

Le secteur des transports comprend le déplacement des personnes et des marchandises par voitures, camions, trains, bateaux, avions et autres véhicules. Pour ce qui est du transport de marchandises en particulier, les camions moyens et lourds sont responsables de 26 % des émissions totales de GES du secteur, tandis que les chemins de fer ne représentent que 2 % des émissions. Les émissions de GES proviennent principalement de la combustion de combustibles fossiles pour la propulsion, et le diesel est le carburant le plus utilisé pour le transport de marchandises. 

En tant que gestionnaire dynamique d’actifs fondamentaux, nous sommes restés un investisseur important dans le secteur ferroviaire pendant de nombreuses années. Nous voyons deux considérations ESG clés dans l’analyse du secteur ferroviaire. Tout d’abord, pour une quantité donnée de marchandises, les chemins de fer constituent un mode de transport à émissions de GES relativement faibles. Deuxièmement, l’industrie fait preuve de nombreuses initiatives pour réduire son profil d’émissions de GES. Nous pensons que des empreintes environnementales favorables et en amélioration soutiennent la performance de l’industrie au fil du temps. Nous continuons également à soutenir les nombreux efforts de décarbonisation de l’industrie du transport de marchandises par le biais d’un engagement actif, et nous voyons apparaître des opportunités de risque et de récompense intéressantes en fournissant des capitaux pour ces initiatives de décarbonisation. 

Les chemins de fer sont le moyen le plus économe en carburant pour le transport terrestre de marchandises

En s’appuyant sur des mesures générales, l’Association of American Railroads (AAR) estime que les chemins de fer de marchandises ont, en moyenne, un rendement énergétique 3 à 4 fois supérieur à celui des camions. Le groupe professionnel estime en outre que le transport de marchandises par train plutôt que par camion permet une réduction des émissions de gaz à effet de serre de jusqu’à 75 %. 

Une étude plus approfondie a été réalisée par le Department of Transportation (DoT) en 1991 par le biais de simulations visant à comparer le train et le camion entre les mêmes lieux d’origine et de destination. Bien que l’étude date, les technologies du rail et du camion se sont améliorées depuis, et nous pensons donc que les conclusions générales restent pertinentes à ce jour. L’étude du DoT a montré que le train avait un rendement énergétique (tonnes-milles par gallon) de 1,4 à 9 fois supérieur à celui des services concurrents de transport par camion. Les rails rivalisent le plus directement avec l’autoroute pour le déplacement des conteneurs d’expédition. Dans cette catégorie, le transport ferroviaire était de 2,51 à 3,43 fois plus économe en énergie que les transports par camion comparables. L’étude a également révélé que l’avantage du transport ferroviaire par rapport au transport routier en termes de rendement énergétique augmente avec les distances. 

Les chemins de fer ont considérablement amélioré leurs opérations depuis la publication de l’étude du DoT, ce qui a permis d’obtenir des améliorations significatives en matière de rendement énergétique. Tout d’abord, le secteur s’est orienté vers un modèle d’exploitation ferroviaire de précision, qui implique la circulation de trains plus longs aux heures prévues. Cela signifie que les trains passent moins de temps au ralenti et que moins d’actifs sont nécessaires pour transporter la même quantité de marchandises. Deuxièmement, les chemins de fer ont investi massivement dans la création de la capacité du réseau en ajoutant des voies d’évitement et en doublant la voie sur les principaux corridors. Ces investissements ont permis d’améliorer les temps d’immobilisation et ont conduit à une amélioration globale du rendement énergétique. Troisièmement, les moteurs des locomotives sont devenus plus économes en carburant et des technologies telles que l’alimentation distribuée ont encore amplifié ces gains. Enfin, l’adoption de technologies auxiliaires telles que les portails d’inspection automatisés, les wagons d’inspection et autres, continue d’améliorer la fluidité des réseaux ferroviaires et de débloquer des gains supplémentaires en matière de rendement énergétique. 

Des mélanges de carburants renouvelables pour débloquer la prochaine étape de la réduction des GES

Le Chemin de fer Canadien National a été l’un des premiers à adopter le modèle de planification ferroviaire de précision et, depuis, il est un chef de file de l’industrie en matière de leadership environnemental. Grâce à ces initiatives, l’entreprise a pu réduire son intensité de GES de 43% entre 1993 et 2020. D’autres chemins de fer ont suivi un scénario semblable et nous prévoyons que l’industrie convergera vers un niveau similaire d’intensité de GES dans les années à venir.

Source: Chemin de fer Canadien National

Nous continuons à penser qu’il y a encore beaucoup de possibilités d’amélioration. En nous appuyant sur notre engagement auprès de certaines des principales compagnies ferroviaires, nous pensons que le secteur sera en mesure d’améliorer de 1 à 2 % l’intensité des émissions de GES par an, en moyenne, au cours de la prochaine décennie. Nous pensons que le renouvellement du parc de locomotives sera le principal facteur de réduction, complété par des améliorations constantes de la technologie. 

Les carburants plus propres devraient toutefois être le moteur le plus significatif et nos conversations suggèrent que cette initiative pourrait réduire les émissions de GES de 3 à 4 % supplémentaires par an, en moyenne. La meilleure opportunité reste l’utilisation de mélanges de carburants renouvelables durables dans les parcs de véhicules existants pour réaliser immédiatement ces améliorations.

Les technologies futures pourraient modifier la dynamique relative des GES

En dehors des gains progressifs découlant des possibilités évoquées ci-dessus, des efforts sont en cours pour explorer des technologies de propulsion radicalement différentes qui pourraient modifier de manière significative l’intensité des émissions du transport de marchandises à l’avenir. Ces technologies sont développées et testées à la fois du côté du transport routier et du transport ferroviaire. 

L’électrification du réseau de transport de marchandises nord-américain par la construction de lignes caténaires à haute tension, leur intégration au réseau électrique et leur alimentation en énergie renouvelable serait la solution la plus respectueuse de l’environnement. Toutefois, nous estimons que le coût de l’électrification de l’ensemble du réseau de transport de marchandises des États-Unis, soit 140 000 miles, et du remplacement du parc de 24 000 locomotives pourrait atteindre 1 000 milliards de dollars, ce qui est probablement prohibitif.

Ainsi, nous nous attendons à ce que les autres technologies de propulsion restent l’objectif principal. Les chemins de fer explorent actuellement la conception de locomotives électriques à batterie, à pile à combustible à hydrogène et au gaz naturel. Chaque solution potentielle fait l’objet d’essais actifs par différents chemins de fer nord-américains, mais il reste plusieurs défis à relever avant qu’elles ne puissent être adoptées à grande échelle. Nous suivrons de près les essais de ces solutions potentielles et leur évolution, car il pourrait y avoir des opportunités d’investissement intéressantes pour faciliter leur adoption. Les opportunités pourraient provenir d’investissements directs dans les chemins de fer eux-mêmes, mais aussi dans des entreprises telles que Ballard Power Systems, qui développe des piles à hydrogène pour la propulsion ferroviaire, ou Wabtec, qui a conçu des locomotives alimentées par batterie. Il pourrait y avoir des possibilités d’investissement intéressantes dans l’adoption de certaines de ces solutions pour réduire les émissions de GES du transport ferroviaire. 

Le vote par procuration des investisseurs et leur engagement auprès des entreprises et des décideurs ont également un impact sur l’adoption de ces solutions potentielles. En tant qu’investisseur important dans l’industrie du transport de marchandises, notre engagement et nos votes par procuration soutiennent la décarbonisation en cours de l’industrie.

Il convient de noter que ces technologies sont également développées et testées dans des applications de camionnage. Le développement de ces technologies pour le camionnage pourrait peut-être même progresser plus rapidement que pour le transport ferroviaire, étant donné que le marché total potentiel du camionnage est plus important (une plus grosse part du gâteau). Compte tenu de cette dynamique, nous nous attendons à ce que l’avantage considérable dont jouissent actuellement les chemins de fer en matière d’efficacité dans le domaine de GES par rapport au camionnage se resserre au cours de la prochaine décennie. Cependant, malgré ces progrès, nous ne voyons pas l’écart se combler complètement et nous pensons que les chemins de fer continueront à être un moyen plus écologique de transporter des marchandises dans un avenir prévisible. 


Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.

Savoir ce que l’on possède : analyse fondamentale et utilisation de notations ESG propriétaires

Une faible corrélation entre les fournisseurs tiers de notations ESG peut constituer un signal important pour les investisseurs. Le fait de s’appuyer fortement sur de telles notations peut conduire à des résultats très différents pour le portefeuille, et les opinions divergentes des agences de notation ESG tierces peuvent être source de confusion pour les clients ou les investisseurs. Ce problème confirme qu’il ne faut pas se fier uniquement aux agences de notation et souligne l’importance de savoir ce que l’on possède.

Pour savoir ce que vous possédez, il est d’abord nécessaire de développer une compréhension des caractéristiques ESG d’une entreprise par le biais de sa propre analyse fondamentale. C’est là que les notations ESG exclusives peuvent entrer en jeu et offrir des avantages aux parties prenantes. De nombreux analystes pourraient trouver qu’une compréhension et une analyse plus approfondies de tous les éléments de l’« ESG » (performance environnementale, facteurs sociaux et pratiques de gouvernance d’entreprise) permettent de mieux formuler des avis éclairés et de s’engager. Par exemple, les facteurs sociaux tels que la diversité, l’équité et l’inclusion (DÉI), les pratiques en matière de travail et d’embauche, l’engagement communautaire et les enjeux liés à la réputation peuvent être complexes et difficiles à saisir dans des notes, mais ils contribuent à l’analyse globale de l’attrait d’une entreprise en tant qu’investissement et se prêtent à une connaissance approfondie de l’entreprise et du secteur dans lequel elle opère.

L’expression de cette analyse dans des notations ESG exclusives fournit donc une mesure cohérente en interne, à la fois quantitative et qualitative, pour aider à mesurer et à analyser les risques et les opportunités de durabilité d’une entreprise. Les investisseurs qui effectuent eux-mêmes ce travail peuvent en tirer plusieurs avantages, notamment des avantages en termes d’information, de rapport risque/récompense et d’impact potentiel grâce à l’analyse comparative.

1. L’avantage informationnel des notations ESG propriétaires

L’analyse des caractéristiques ESG des entreprises implique l’utilisation de mesures quantitatives et qualitatives de ce qui est le plus important et le plus pertinent pour le secteur d’activité de chaque entreprise. Dans certains cas, les données de l’ensemble du secteur sont généralement disponibles, comme les niveaux d’émissions de carbone dans le secteur des services publics ou les données sur la sécurité des employés dans le secteur industriel ; dans d’autres cas, cependant, l’analyste doit tirer des recherches primaires sur l’entreprise à partir d’une analyse directe. 

Les recherches publiées et les divulgations publiques entrent en ligne de compte dans l’élaboration des notations ESG, mais il en va de même pour les réunions et les engagements en face à face avec les entreprises et l’expérience spécifique au secteur. Ce travail exclusif permet de déterminer les questions environnementales, sociales et de gouvernance spécifiques qui sont pertinentes pour chaque entreprise (Graphique 1). Les conversations directes, dans le cadre d’un dialogue dynamique et symbiotique avec les dirigeants de l’entreprise, souvent sur plusieurs années, peuvent ajouter des perspectives qui créent un avantage en termes d’information. Il s’agit d’un avantage qu’un analyste fondamental ayant une connaissance approfondie de l’entreprise aura aussi intérêt à utiliser. Cet avantage en termes d’information est particulièrement important dans le cas des actions détenues par un grand nombre de personnes et qui présentent des histoires complexes en matière de durabilité, comme les grandes plateformes technologiques, Amazon.com, Apple et Google.

Graphique 1 : Échantillon du Cadre de matérialité ESG ClearBridge

Source : ClearBridge Investments

2. Les notations propriétaires capturent l’information sur le risque et la récompense, mais ne sont pas pour autant synonymes de cette information

L’analyse ESG, exprimée sous la forme d’une notation, doit constituer une partie essentielle de la diligence normale effectuée dans le cadre de l’analyse fondamentale, ce que nous faisons dans le cadre de notre processus pour aider à trouver des entreprises de qualité aux fondements solides. Dans le même temps, les notations ESG peuvent mettre en évidence des facteurs spécifiques à l’ESG qui doivent être mieux comparés et compris.

Bien que les notations ESG soient prises en compte dans les recommandations d’investissement, elles ne constituent pas en soi des recommandations d’achat ou de vente d’actions. Néanmoins, nous avons constaté qu’elles contribuent au rendement. Dans des études récentes sur la performance et les caractéristiques fondamentales des actions classées ESG de ClearBridge publiées avec les Principes pour l’investissement responsable (PRI) soutenus par l’ONU, nous avons constaté que les actions ayant une meilleure notation ESG : 

  • Ont enregistré des rendements supérieurs au marché plus fréquemment que les actions moins bien notées sur le plan ESG. 
  • Ont généré des rendements ajustés au risque plus élevés (mesurés par leurs ratios de Sharpe) que les actions moins bien notées, les actions AAA et AA générant des rendements ajustés au risque plus élevés que l’indice S&P 500 Equal-Weight. 
  • A généré un alpha plus élevé que les actions moins bien notées sur le plan ESG après la prise en compte des expositions aux facteurs communs, notamment le bêta du marché, sa taille, sa valeur, son momentum et sa qualité.

Ces études montrent comment un système exclusif de notation ESG développé par des investisseurs fondamentaux semble contribuer à la performance et avoir un avantage supplémentaire au-delà de ce qui pourrait être expliqué par des facteurs quantitatifs communs et des indicateurs financiers fondamentaux.

3. L’analyse comparative pour l’impact

Les notations ESG exclusives sont un outil permettant de communiquer aux gestionnaires de portefeuille notre confiance ou nos attentes en matière de progrès sur les questions ESG. En plus d’éclairer les décisions d’investissement des gestionnaires de portefeuille, elles guident également la manière dont nous utilisons le capital des clients pour chercher à avoir un impact dans les entreprises où nous investissons. 

Dans les secteurs où des recherches exclusives ont identifié une entreprise chef de file en matière de pratiques durables, de politiques du travail et du lieu de travail ou d’autres facteurs ESG, nous utiliserons souvent ladite entreprise comme référence pour une comparaison quantitative ou qualitative. Nous communiquons également les meilleures pratiques lors des engagements des entreprises, en reconnaissant que les entreprises peuvent bénéficier des idées que nous proposons et des commentaires que nous leur fournissons sur les principaux enjeux. Parmi les exemples, citons la rétroaction sur les divulgations en matière de DÉI, qui cherche à aider les gestionnaires à comprendre le bassin de talents de leurs employés ; les recommandations sur les pratiques de rémunération des cadres supérieurs ; et le soutien aux stratégies de décarbonisation employées plus tôt que tard. 

Les évaluations ESG par des tiers peuvent bien sûr constituer un apport précieux, et de nombreux innovateurs dans le domaine de l’investissement responsable contribuent à améliorer la qualité des données et à approfondir la base de connaissances ESG. Mais dans la mesure où les notations ESG peuvent bénéficier de l’analyse fondamentale, qui offre des avantages en termes d’information, capture les informations sur le risque/récompense et sous-tend l’engagement, les développer principalement à partir de sa propre analyse fondamentale a beaucoup de sens.


Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.

Rénovations, R&D et bâtiments régénératifs: investir dans l’immobilier durable

Dans le débat sur le réchauffement climatique, le secteur immobilier doit s’imposer comme un acteur clé. Nos logements, nos bureaux, nos magasins, nos espaces de loisirs – autrement dit, l’ensemble des infrastructures physiques indispensables à notre prospérité et à notre bien-être – représentent en effet près de 40 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Et l’environnement bâti est à l’origine d’autres problèmes écologiques, à commencer par une consommation d’eau et d’énergie ainsi qu’une production de déchets excessives.

Fig 1: Empreinte considérable Secteur du bâtiment et de l’immobilier: estimation de la contribution à l’économie et à l’environnement

Source: Programme pour l’environnement de l’ONU, 2019


Comment réduire l’empreinte écologique du secteur immobilier ? Tel était le thème du Forum de Klosters de cette année, qui portait sur « l’avenir de l’environnement bâti ». Le Forum de Klosters est une organisation à but non lucratif basée en Suisse qui vise à accélérer le changement positif pour l’environnement en encourageant le dialogue et la collaboration. À l’occasion de sa réunion annuelle de trois jours en juin, notre collègue Zsolt Kohalmi, responsable des investissements dans l’immobilier et co-CEO de Pictet Alternative Advisors, a lancé le débat en mettant en évidence les difficultés liées à l’évaluation des caractéristiques environnementales de l’immobilier. Il a notamment évoqué la « valeur temporelle des émissions de carbone », représentative des complexités auxquelles les sociétés immobilières et les investisseurs sont confrontés à l’heure de la transition vers des pratiques plus durables.

Le carbone incorporé : le sombre secret de la construction

Si l’on prend en compte la durée de vie moyenne d’un bâtiment, jusqu’à 45% des émissions totales sont produites durant les deux premières années, c’est-à-dire pendant la phase de construction, qui comprend l’extraction de matières premières, leur transformation, le transport, l’installation et la gestion des déchets. Cette part d’émissions – aussi appelée carbone incorporé – dépasse largement les émissions de carbone opérationnelles, soit le volume de carbone émis chaque année après la mise en service du bâtiment.

Les participants au Forum de Klosters, qui comprenaient des architectes, urbanistes, start-ups de construction verte, scientifiques en sciences des matériaux et investisseurs, ont partagé leurs expériences personnelles, ainsi que leurs réflexions sur les mesures à adopter pour répondre aux enjeux environnementaux dans le secteur immobilier. Plusieurs thèmes en sont ressortis, notamment le rôle de la nature dans l’environnement bâti. Les participants se sont accordés sur la nécessité de reconnecter l’environnement bâti avec la nature. Ceci implique l’adoption de techniques de construction novatrices, passant par l’intégration d’éléments naturels et régénérateurs, l’expérimentation de matériaux biosourcés, tels que le bois et les algues, ou encore la mise en œuvre de stratégies de reforestation, de reboisement et d’autres méthodes de capture du carbone.

Mikolaj Sekutowicz, un participant au Forum et partenaire responsable du développement stratégique ainsi que de la culture au sein du Groupe Therme, une entreprise qui développe un nouveau projet du secteur riverain à Toronto, s’est référé à la phrase célèbre du botaniste italien Stefano Mancuso « Nous vivons dans une sorte d’aveuglement à l’égard des plantes et de la nature ». À quoi Sekutowicz a ajouté : « Nous devons intégrer la nature dans notre culture. Car culture et nature ne sont pas antithétiques ».

Rénover plutôt que démolir et reconstruire

La construction de nouveaux bâtiments, même au moyen de techniques durables, n’est pas forcément la panacée. Dans de nombreux pays développés, où les bâtiments ont été construits durant les dernières décennies, la rénovation du parc immobilier existant peut s’avérer une meilleure option pour réduire les émissions de carbone. En Europe, par exemple, où environ 90% du parc immobilier a été construit avant 1990, et 40% avant 1960, les émissions de CO2 liées aux rénovations seraient de 70% inférieures aux volumes associés aux nouvelles constructions, compte tenu du carbone incorporé.

Cela ne veut pas dire pour autant que pour d’autres régions du monde, construire ne s’avère pas nécessaire. Notamment, pour les économies asiatiques, africaines et latino-américaines qui auront besoin de surfaces résidentielles et commerciales supplémentaires pour répondre à l’augmentation de la population. Il n’existe pas de solution universelle en matière de bâtiments durables. Les approches adoptées doivent être décidées au cas par cas, en prenant compte des caractéristiques propres au lieu considéré, telles que les technologies de construction adaptées aux différentes géographies et les matériaux de base à disposition.

Venise : Approches modernes et classiques de la construction durable

Venise, ville italienne dont l’existence même est menacée par le changement climatique, peut être source d’inspiration.  Au moment de sa construction il y a 1600 ans, des aulnes résistants à l’eau, abondants dans les forêts voisines, avaient été utilisés pour édifier des fondations capables d’assurer la stabilité des bâtiments sur des sols marécageux. Aujourd’hui, c’est vers de nouvelles solutions basées sur la nature que la ville se tourne pour assurer son avenir. Par exemple, elle recourt aux matériaux naturels disponibles dans la région et à une main d’œuvre locale pour construire des fortifications dans la ceinture de marais salants, qui représente la meilleure protection contre les tempêtes et les courants marins. Les habitants et des entreprises locales contribuent par ailleurs à ce projet de bio-ingénierie, synonyme d’emplois et d’opportunités économiques pour la région.

Comme le montrent les efforts déployés à Venise, les gouvernements et les autorités municipales ont un rôle clé à jouer en matière de construction durable. Les participants au Forum prônent des politiques basées sur la stratégie de la carotte et du bâton – encourageant les sociétés et les projets favorables au climat et à la nature par le biais d’allègements fiscaux et de subventions intelligentes, tout en pénalisant ceux qui sont nuisibles.

Investir dans la R&D et les méthodes de construction durable

Augmenter l’investissement dans la recherche et le développement (R&D) doit également devenir une priorité si l’on entend renforcer la compétitivité, encourager l’innovation et accélérer la transition durable. Le secteur de la construction est traditionnellement considéré comme un secteur conservateur et peu axé sur la technologie, faute d’investissements suffisants en R&D (moins de 5% des revenus, contre 10% au moins dans les secteurs de la santé et des technologies de l’information, selon les estimations)¹. 

Le secteur financier a également un devoir. La transition durable dans le bâtiment offre des opportunités d’investissement importantes et croissantes sur le long terme. Le secteur doit notamment investir des capitaux privés dans les bâtiments durables afin de répondre à la demande toujours plus forte des investisseurs pour des solutions intégrant des considérations environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) et/ou entraînant des changements positifs. Face à une demande de constructions éco-efficientes et respectueuses de l’environnement qui ne cesse d’augmenter, une approche plus réfléchie des processus de construction, de gestion, de rénovation et de démolition s’impose pour adapter l’environnement bâti au défi climatique et le rendre équitable pour tous.

Comme le disait l’ancien Premier ministre britannique Winston Churchill en 1944 : « Nous façonnons nos bâtiments ; par la suite, ils nous façonnent. ».

Source
[1] European Commission, OECD et Pictet Asset Management


Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.

Le captage, l’utilisation et le stockage du carbone : une occasion de diversification des investissements

Au cours des deux dernières décennies, les énergies renouvelables et l’électrification des transports, en particulier les véhicules électriques, ont bénéficié d’une part importante du capital des investisseurs. Cette tendance à l’adoption d’énergies alternatives à faible teneur en carbone ne montre aucun signe de ralentissement, les sociétés se lançant dans une course contre la montre pour réduire leur empreinte carbone. Selon le récent rapport de BloombergNEF (BNEF) [Tableau 1], les investissements mondiaux dans la transition énergétique à faible émission de carbone ont atteint 755 milliards de dollars en 2021, marquant une augmentation de 27 % par rapport à 2020. On s’attend à ce que ce goût prononcé pour la réduction des émissions de carbone reste bien présent dans l’esprit des décideurs et des investisseurs à mesure que se rapproche l’échéance de 2030/2050 pour atteindre les émissions nettes nulles. L’atteinte de zéro émission nette constitue une occasion unique pour les investisseurs. Une solution potentiellement prometteuse dans ce secteur est le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (« CUSC »).

Tableau 1: Investissement mondial dans la transition énergétique par secteur

Source : BNEF, Energy Transition Investment Trends 2022

CUSC désigne les technologies qui captent le CO2 à partir de sources ponctuelles importantes. Le plus souvent, ces sources sont des installations de production d’électricité ou des processus industriels qui utilisent des combustibles fossiles ou de la biomasse comme carburant, comme les installations de fabrication de ciment ou d’engrais. Il existe également de nouvelles technologies dans le cadre du CUSC qui permettent de capter le CO2 directement de l’atmosphère, connues sous le nom de « captage direct dans l’air », mais ces projets à grande échelle n’en sont qu’à leurs débuts. Certains projets visent à injecter et à stocker le CO2 de manière permanente sous terre, ce qui pourrait atténuer les rejets nocifs dans l’atmosphère. Grâce au CUSC, le CO2 capté est utilisé dans toute une série d’autres applications, telles que la production d’engrais, les serres, le traitement de l’eau, ou utilisé comme matière première dans les carburants synthétiques. 

Si le CUSC existe depuis les années 1970, les coûts élevés et le manque d’incitations économiques ont freiné son développement. Toutefois, l’avenir du CUSC est très prometteur compte tenu de l’élan récent qui a conduit à un développement et à un intérêt accrus pour celui-ci dans le secteur de l’énergie. Les principaux moteurs de cet élan sont l’explosion du nombre d’engagements « net zéro » de la part des gouvernements et des entreprises, l’augmentation de la confiance des investisseurs grâce aux politiques connexes et l’émergence de nouveaux modèles d’affaires. Parmi les partisans de la technologie CUSC et les acteurs les plus expérimentés dans ce domaine figurent certains des producteurs d’énergie parmi les plus grands émetteurs de CO2, dont un nombre croissant envisage la technologie CUSC comme un élément essentiel de leurs plans de transition vers une économie à faible émission de carbone.

Collaborations dans le cadre du CUSC

La Pathways Alliance, une coalition des six plus grands producteurs de sables bitumineux du Canada, qui représentent 95 % de la production de sables bitumineux du pays, collabore activement à la réalisation de l’objectif Net Zero d’ici 2050, qui consiste à éliminer 22 millions de tonnes d’émissions d’ici 2030 grâce à un investissement de 24 milliards de dollars dans des installations de captage et de stockage du carbone. Des coalitions similaires se sont également formées au sud de la frontière, telles que la Houston Carbon Capture & Storage Alliance (CCS) et la Washington D.C’s Carbon Capture Coalition, une collaboration non partisane de plus de 100 entreprises, syndicats, organisations de préservations et groupes de politique environnementale, visant à soutenir la politique fédérale de déploiement des technologies de gestion du carbone. 

Potentiel de croissance

Le CUSC présente également un potentiel de croissance économique important, comme l’a noté la Houston Carbon Capture & Storage Alliance, qui estime que les investissements privés pourraient atteindre plus de 60 milliards de dollars et permettre la création de plus de 18 000 emplois par an liés à ces projets dans le seul État du Texas. Avec l’acceptation croissante de la technologie CUSC, les acteurs du secteur de l’énergie sont passés du statut de lobbyistes contre le changement climatique à celui de champions du « Net Zero », soulignant que le CUSC est une opportunité viable de répondre aux besoins énergétiques et industriels tout en réduisant les émissions de CO2.

Soutien des gouvernements canadien et américain

L’activité dans l’espace a également augmenté, les décideurs politiques du monde entier ayant récemment affecté près de 18 milliards de dollars américains au développement et au déploiement du CUSC. À ce jour, le Canada et les États-Unis restent parmi les pays les plus actifs en matière de soutien au CUSC. Ensemble, les États-Unis et le Canada représentent 65 % de la capacité mondiale de captage du carbone, et de nouvelles politiques ciblées constituent des incitations positives pour le développement et le déploiement du CUSC Les facteurs favorables au CUSC comprennent la loi américaine sur la réduction de l’inflation (IRA), qui offre des incitations substantielles aux projets liés au CUSC en augmentant le montant du crédit (le double pour les centrales électriques et industrielles et le triple pour le captage direct dans l’air) et en prolongeant les délais de qualification de 7 ans, jusqu’en 2033.

Parallèlement, grâce à la loi américaine sur l’investissement dans les infrastructures et l’emploi, environ 12 milliards de dollars américains seront offerts à la chaîne de valeur du CUSC sous forme de financement de la recherche et du développement (R&D), de prêts et d’aide à l’obtention de permis. Au Canada, le gouvernement fédéral a proposé un crédit d’impôt à l’investissement remboursable pour les projets de CUSC évalués à 2,6 milliards de dollars canadiens entre 2022 et 2030. En outre, 319 millions de dollars canadiens seront investis dans la R&D pour faire progresser la viabilité commerciale du CUSC dans le cadre du budget fédéral de 2021. En outre, les commentaires récents des politiciens canadiens expriment un désir à court terme d’augmenter les crédits d’impôt canadiens pour les aligner sur ceux des États-Unis, ce qui accélérera et élargira probablement le potentiel de développement des projets de CUSC.

Tableau 2: Projets de captage du CO2 à l’échelle commerciale en cours de développement

Tableau 3: Dépenses historiques et potentielles annualisées pour les projets

Tableau 2 & 3 Source : IEA, World Energy Investment 2022

Selon le rapport de l’IEA intitulé World Energy Investment 2022, plus de 300 projets sont actuellement à différents stades de la chaîne de valeur du CUSC dans le monde entier [Tableau 2]. Les puissants courants porteurs de la politique législative et le soutien des acteurs du marché, tant publics que privés, ont préparé le terrain pour que le CUSC figure parmi les technologies les plus défendues dans la lutte contre le changement climatique. Alors que le monde entre dans une nouvelle ère de décarbonisation, tous les regards se tournent vers le potentiel du CUSC, qui offre aux investisseurs une possibilité de diversifier davantage leurs portefeuilles énergétiques au-delà et en complément des énergies renouvelables et des transports électrifiés. 


Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.

Certification de l’information sur la durabilité : s’armer contre l’écoblanchiment

L’engouement pour les investissements faits en fonction de facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) ne se dément pas. En effet, selon Bloomberg Intelligence, la valeur des actifs de cette catégorie devrait connaître une forte augmentation au cours des trois prochaines années, pour passer de 35 à 50 billions de dollars américains.

Et c’est sans compter le marché mondial des instruments d’emprunt durables, qui enregistre une croissance phénoménale. Selon une étude menée par Comptables professionnels agréés du Canada (CPA Canada) et l’International Federation of Accountants (IFAC), les émissions d’obligations vertes, à impact social, durables et liées à la durabilité se sont chiffrées à 1 billion de dollars américains en 2021 – un record – et devraient atteindre 1,35 billion de dollars américains cette année.

Pour ces deux catégories, les investisseurs prennent leurs décisions en matière d’affectation du capital en se fondant sur une information relative à la durabilité dont la publication est, dans bien des cas, facultative. Pour l’heure, les organisations sont libres de choisir leurs indicateurs, de cibler les éléments qui les montrent sous un jour favorable, et donc de se dépeindre comme étant plus « durables » qu’elles ne le sont en réalité, ce qui fait craindre des pratiques d’écoblanchiment.

Selon une étude, plus de 90 % des plus grandes sociétés ouvertes présentent de l’information sur la durabilité, mais seulement 58 % d’entre elles font vérifier cette information, et pas nécessairement par des comptables. Pourtant, ces derniers sont sans doute les mieux placés pour certifier l’information financière. C’est pourquoi de nombreux investisseurs ont recours à des analyses indépendantes d’agences de notation et de fournisseurs de données ESG afin de prendre des décisions d’investissement selon leurs propres critères.

En ce qui a trait aux instruments d’emprunt durables, les investisseurs doivent évaluer les choix d’indicateurs de durabilité des émetteurs et se demander si ces indicateurs permettent de mesurer efficacement la performance d’un instrument. Il leur faut également vérifier si cette information a été certifiée et comment elle l’a été.

Pour lutter contre l’écoblanchiment et s’assurer que les investisseurs puissent prendre des décisions d’investissement éclairées, il est donc essentiel de se doter d’une information sur la durabilité de grande qualité, transparente et vérifiée de manière indépendante. Compte tenu de l’importance du capital en jeu, cette information doit être d’aussi bonne qualité que l’information financière des sociétés.

La durabilité : un état des lieux

L’IFAC a mené, en collaboration avec l’AICPA-CIMA, une étude comparative mondiale, intitulée The State of Play in Sustainability Assurance, de l’information sur la durabilité et des pratiques de certification de 1400 grandes sociétés ouvertes dans 22 pays.

Les résultats de cette étude sont révélateurs. On y constate que la nature des travaux de certification est généralement limitée et que les pratiques et les fournisseurs de services varient d’un pays à l’autre. Il en résulte possiblement un écart entre les attentes des investisseurs et la réalité, ce qui donne à penser que des progrès restent à faire. Voici les faits saillants de l’étude :

  • Plus de 90 % des sociétés présentent de l’information sur la durabilité, mais seulement 58 % d’entre elles la font certifier, et, dans bien des cas, la certification ne porte que sur une partie de l’information publiée. Lorsque ces sociétés font appel à des cabinets de professionnels comptables, ces derniers appliquent, dans 94 % des cas, les normes de l’International Auditing and Assurance Standards Board (IAASB), organisme qui établit les normes mondiales en matière d’audit, de certification et de gestion de la qualité. La majorité des autres fournisseurs de services appliquent des normes distinctes dans le cadre de leurs missions.
  • Il existe deux niveaux d’assurance : limitée et raisonnable. À l’heure actuelle, plus de 80 % des missions de certification de l’information sur la durabilité procurent une assurance limitée. Il s’agit certes d’un niveau valable, mais qui n’égale en rien celui d’un audit des états financiers. Dans le bulletin Alerte certification en durabilité : Expression d’une assurance par des tiers à l’égard de l’information relative à la durabilité, CPA Canada analyse ce thème plus en profondeur.

L’harmonisation des normes se poursuit à l’échelle mondiale

Presque 20 ans après le lancement par les Nations Unies d’une initiative historique, Who Cares Wins, ayant mené à l’apparition du terme « ESG », la nécessité de l’information sur la durabilité n’est plus à démontrer, tant pour les investisseurs que pour les sociétés de toutes tailles, quel que soit le secteur ou le pays. En revanche, déroutés par une profusion de référentiels d’application facultatifs entraînant complexité et confusion, les émetteurs ne savent pas quelle méthode employer pour présenter cette information.

En novembre 2021, l’IFRS Foundation a mis sur pied l’International Sustainability Standards Board (ISSB), qui œuvre de concert avec l’International Accounting Standards Board en vue de la création d’une base de référence mondiale en matière d’information sur la durabilité et de la mise à la disposition des investisseurs d’informations cohérentes et comparables de grande qualité.

Ce nouvel organisme avance rapidement. En mars 2022, il a publié les exposés-sondages de ses deux premières normes : IFRS S1 – Obligations générales en matière d’informations financières liées à la durabilité, qui énonce des obligations générales en vertu desquelles les entités seraient tenues de fournir des informations sur l’ensemble des possibilités et risques importants liés à la durabilité qui se présentent à elles; et IFRS S2 – Informations à fournir en lien avec les changements climatiques, qui énonce les obligations en matière d’identification, d’évaluation et de communication des informations en lien avec les changements climatiques.

Parallèlement, des initiatives d’information propres à certains pays ou territoires voient le jour. Celle de l’Union européenne est la plus aboutie. Au Canada, la création du Conseil canadien des normes d’information sur la durabilité (CCNID) a été annoncée en juin 2022. Ce dernier devrait entrer en activité en avril 2023. En matière de réglementation, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) et la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis poursuivent leurs efforts en vue de la formulation de leurs propres propositions visant l’amélioration et l’uniformisation de l’information sur la durabilité. Des représentants des organismes de réglementation nationaux se rencontrent au sein de groupes de travail afin d’aplanir autant que possible les différences.

Une dynamique se dessine en faveur de normes de certification de l’information sur la durabilité d’application obligatoire

L’IAASB travaille à l’élaboration d’une norme distincte d’application générale, qu’il prévoit de publier pour commentaires au deuxième semestre de 2023. S’appuyant sur les normes et les indications existantes de l’IAASB, cette norme portera sur la certification de l’information qui a trait à tous les sujets liés à la durabilité et sur les référentiels d’information.

L’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) a salué les importants travaux de l’IAASB, menés conjointement avec le Conseil des normes internationales de déontologie comptable (IESBA). « Ces normes amélioreront l’uniformité, la comparabilité et la fiabilité des informations sur le développement durable qui sont présentées, rehaussant ainsi la confiance à l’égard de ces informations », s’est réjoui l’OICV.

Les États-Unis et l’Union européenne envisagent déjà d’exiger que les travaux de certification de ce type d’information procurent un niveau d’assurance raisonnable. Si les acteurs des marchés souhaitent traiter l’information sur la durabilité sur un pied d’égalité avec l’information financière, le niveau d’assurance doit être relevé en conséquence.

En conclusion

L’influence des investisseurs a été décisive pour pousser à l’élaboration de normes de haute qualité en matière d’information sur la durabilité. Il faut maintenant se concentrer sur la certification de cette information afin qu’elle parvienne au même niveau de cohérence, de comparabilité et de fiabilité que l’information financière. Nous vous invitons à vous informer sur les initiatives de CPA Canada et de l’IFAC sur les facteurs ESG. N’hésitez pas à participer aux discussions et à donner votre avis, notamment lors des consultations. C’est ainsi que les changements iront dans le bon sens.


Clause de non-responsabilité de l’AIR
Les points de vue et opinions exprimés dans cet article n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue ou la position de l’Association pour l’investissement responsable (AIR). L’AIR n’approuve, ne recommande ni ne garantit aucune des revendications formulées par les auteurs. Cet article est conçu comme une information générale et non comme un conseil en investissement. Nous vous recommandons de consulter un conseiller qualifié ou un professionnel en investissement avant de prendre une décision de placement ou liée à un investissement.